J'ai été FELLAGHA, OFFICIER FRANCAIS ...

JAI ETE FELLAGHA, OFFICIER FRANÇAIS ET DESERTEUR  

DU F.L.N. A  L’O.A.S. 

Auteur : Rémy MADOUI 

Editions : SEUIL   Avril 2004.

 

Acheté par LRT le 18/05/2004   lu en juin 2004.   Note 15/20

 

 

 

Mes commentaires

Page 33 :

Par contre, je connaissais, pour les avoir côtoyées quotidiennement, la misère, la dégradation et l’oppression auxquelles la grande majorité des Algériens était soumise. Le colonialisme en était la cause. Seul, le démantèlement de ce système, pouvait améliorer le sort du peuple.

Le désir d’aventure, qu’une révolution peut faire naître dans l’esprit d’un adolescent de 16 ans, n’y était pas étranger.

Tous les héros, gravés dans mon imagination depuis l’enfance, Français et Algériens, ressurgissaient. Je devenais Vercingétorix et le Berbère Jugurtha, menant une lutte acharnée pour défendre le dernier carré contre le colonialisme.

J’étais avec Du Guesclin, Massinissa et l’émir Abdelkader chevauchant nos destriers, le sabre au clair, sus à l’hydre coloniale finalement décapitée.

Page 51 :

Mais, alors, que devient le slogan de Ben Badis (le chef du parti religieux des Oulémas) : « l’arabe est ma langue, l’Islam est ma religion, l’Algérie est ma patrie ? »

Page 74 :

Des Européens et Algériens sont assassinés à la hache, à la serpe, à la pioche et au couteau. Il y a 123 morts dont 71 Européens.

Page 80 :

Était-il incontestablement, dans l’intérêt des Algériens, de les avoir lancés dans le plus atroce des conflits pendant plus de sept années ? La réponse est manifeste quand on connaît le despotisme des dictatures que le peuple continue d’endurer depuis la fin de la guerre en 1962.

Page 147 :

Une culture de la mort avait infesté le FLN. Tout Algérien – ou groupe d’Algériens – qui n’était pas « avec » le FLN était considéré comme traître et méritait la mort.

La terreur, et les éliminations de maquisards ou de militants, devenaient les seuls moyens de gestion de la révolution. D’innombrables leaders, politiques et militaires, ont été tout simplement assassinés par leurs propres frères.

Derrière la façade du combat anticolonialiste, se déroulait une impitoyable guerre civile faite de règlements de comptes claniques, liés à toutes les manipulations possibles pour la conquête du pouvoir.

Page 168 :

Le GPRA, sous le contrôle des colonels du FLN des frontières, exigeait l’indépendance comme condition préalable à toute négociation avec la France.

Son but était de saisir le pouvoir, d’installer un parti unique et une dictature militaire que des élections libres ne leur auraient jamais accordées. C’était, tout simplement, une fin de non-recevoir et un affront à de Gaulle.

Ce comportement ne fit qu’exaspérer les dissensions, entre les maquisards et le GPRA, et amena la tragique « affaire Si Salah ».

Page 181 :

Quel que fût le résultat, la victime était destinée à la mort. La torture était généralement toujours trop poussée pour que la victime y survécût. La plupart mouraient. Ceux, qui ne mouraient pas, étaient tout simplement égorgés. Il fallait économiser les munitions.

Page 190 :

Pour se hasarder à essayer de comprendre la nature de la torture en Algérie, acteurs, victimes et témoins ne doivent pas avoir peur de dire la vérité, aussi pénible soit-elle.

Je ne pense pas qu’il suffit, pour ce faire, de charger quelques officiers français de toutes les horreurs commises pendant la guerre d’Algérie, ni de dénoncer la lâcheté des politiciens, encore moins de déplorer l’indifférence des populations.

Cette démarche pourrait servir à réconforter quelques consciences, ou une conscience nationale, mais elle n’aboutira pas à faire jaillir la lumière sur cette période de notre histoire commune.

Elle ne mènera qu’aux accusations et contrevérités stériles en cours depuis la fin de la guerre d’Algérie. Personne, en France ou en Algérie, n’ignorait que la torture était pratiquée à une large échelle, par tous, et admise par les autorités militaires et politiques impliquées.

Nous sommes tous, Français et Algériens, les héritiers d’actes que nous condamnons aujourd’hui. Nous portons, tous, une grande part de responsabilité devant l’histoire et devant les peuples, français et algérien. L’histoire ne sera pas clémente.

Page 207 :

Le convoi se composait d’un GMC, d’un half-track et d’une Jeep. Deux ans plus tôt, à l’apogée du FLN, ce mini-convoi de nuit aurait été impensable, suicidaire.

Page 210 :

Est-ce qu’une vie commune pouvait exister entre la population algérienne et la population européenne ? C’était la seule solution qui aurait permis à l’Algérie une paix durable, une Algérie nouvelle, reconstruite par tous ses enfants.

Je n’avais aucune illusion quant aux difficultés à faire coexister les deux communautés dans un nouveau système qui serait basé sur l’égalité, la justice et la liberté pour tous.

Page 221 :

Ce révolutionnaire, profondément humain, nous avait aussi communiqué son horreur du fanatisme, du racisme, du nationalisme et de l’extrémisme. 

Page 222 :

Il y eut beaucoup plus de ralliements volontaires que de combats à proprement parler.

 

Page 244 :

Si la récupération de sa dignité doit se faire par l’indépendance, alors il sera pour l’indépendance. Si elle peut se faire avec la France, il sera français.

Dans ce cas-là, le peuple est encore récupérable. La France peut lui redonner sa dignité et sortir l’Algérie du marasme économique et le paysan de sa misère.

Entièrement d’accord, répondis-je à Bussac. La France peut le faire mieux que quiconque. Mais est-ce que la France a la volonté d’entreprendre ce travail de longue haleine ? Est-ce que la France est capable de faire taire les opposants aux réformes, et leurs soutiens, dans une partie de l’armée française ? Et qui implantera ce vaste programme ?

Page 263 :

Les coups les plus rudes portés au FLN, durant la guerre, eurent lieu sous de Gaulle. De Gaulle avait d’abord engagé une guerre sans réserve contre le FLN. Il a toujours voulu conserver l’Algérie à la France.

Il aurait voulu, à défaut d’une Algérie française, tout du moins une Algérie qui fût la locomotive d’un univers prestigieux qu’était « sa communauté française » en Afrique. Un Commonwealth à la française.

De Gaulle a-t-il bradé l’Algérie française, comme certains milieux continuent de l’en accuser encore de nos jours, théorie à laquelle j’ai moi-même souscrit pendant plusieurs années ?

Je crois que ceux, qui ont véritablement bradé l’Algérie, furent ceux qui se sont toujours opposés aux réformes indispensables pour faire accéder la majorité du peuple algérien aux droits et devoirs de la démocratie française, cela afin de préserver leurs intérêts personnels.

 

Page 279 :

La moyenne d’âge était d’une vingtaine d’années. Toutes les régions de France étaient représentées et même une douzaine, de nos camarades, étaient analphabètes, ce qui m’avait beaucoup surpris.

 

Page 280 :

Nous étions tous d’accord au sujet de l’autodétermination : les appelés parce que cela leur permettrait de rentrer chez eux et, Michel et moi, parce que nous croyions que c’était la seule solution au drame algérien.

Nous n’avions aucun doute sur le fait que l’avenir de l’Algérie se ferait avec la collaboration de la France et que l’autodétermination offrait ce choix.

 

Page 286 :

Nous suivions chacune des prises de parole publiques de de Gaulle, nous disséquions chacune de ses phrases. Après avoir écouté la conférence de presse du palais de l’Élysée, le 5 Septembre 1961, nous avons passé une nuit blanche.

De Gaulle a bien réitéré l’autodétermination, mais le ton n’est plus le même, nota Bussac.

Il parle de l’ »avenir du Sahara » comme d’une entité séparée de l’Algérie. Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? poursuivis-je.

Je pense que c’est une manœuvre politique. Il veut faire peur au GPRA. Ce qui m’inquiète, c’est le processus pour arriver à l’autodétermination qu’il vient de décrire, « seul un pouvoir provisoire algérien peut mener le pays à l’autodétermination et aux élections ». Est-ce qu’on ne met pas la charrue avant les bœufs ?

Pire encore, si je comprends bien sa phraséologie, ce pouvoir provisoire sera choisi par le GPRA puisqu’il dit : «  Encore faut-il, bien sûr, que ce pouvoir ait assez de consistance, assez d’audience et, aussi, qu’il se soit mis en accord avec nous sur les conditions de l’opération. » J’espère avoir mal compris son intention.

Bien qu’il lance une invitation au FLN, pour faire partie de cet organisme, tu as raison sur son intention. Je ne vois pas comment il est possible d’avoir des élections libres avec la présence du FLN.

Il a aussi évoqué, clairement, la partition de l’Algérie. Je pense que c’est une autre manipulation politique mais je trouve ça complètement con, il va s’aliéner le peu de dirigeants FLN décents.

Sans compter qu’il est en train de légitimer le séparatisme, ce qui ne va pas échapper à certains excités en Algérie, conclut Bussac.

 

Page 289 :

Le discours du 29 Décembre 1961, du général de Gaulle, allait porter notre inquiétude à son comble. Nous n’avions plus de doute que c’en était fini de l’autodétermination.

« En Algérie, la France entend que se terminent, d’une manière ou d’une autre, les conditions actuelles de l’engagement politique, économique, financier, administratif et militaire qui la tient liée à ce pays et qui, s’il restait ce qu’il est, ne saurait être, pour elle, qu’une entreprise à hommes et à fonds perdus, alors que tant de tâches appellent ses efforts ailleurs. »

Le 5 Février 1962, lors de son allocution radiodiffusée et télévisée, de Gaulle donnait le coup de grâce à l’autodétermination.

Pour la France, l’urgence était la réalisation de la paix en Algérie en créant un exécutif provisoire, et la reconnaissance de l’État souverain de l’indépendance  qui, selon de Gaulle, sortirait de l’autodétermination !

De Gaulle accusait l’O.A.S. d’avoir contribué à ce changement : « Y sont, évidemment pour beaucoup, les troubles suscités par des agitateurs qu’il faut réduire et châtier. »

 

Page 300 :

Certes, le slogan « Algérie française » avait une signification différente selon les différents groupes dont le seul lien était une opposition farouche à l’abandon de l’Algérie. Le souhait commun était un non-retour à l’Algérie d’avant guerre confirmé, une fois la paix revenue, par un changement radical des institutions et des mœurs dans un cadre démocratique et français.

C’était cet espoir qui m’attirait dans l’organisation, mais l’O.A.S. était encore, et surtout, devenue pour moi comme un dernier rempart contre l’extrémisme du F.L.N.

 

Page 306 :

Enchanté de vous connaître, lieutenant. Je suis le capitaine Pierre Montagnon. Vous serez dans mon équipe. Dans quelques heures, nous allons partir pour les Béni Boudouane. Venez choisir une tenue de combat et une arme.

 

Page 311 :

En deux mois à peine, l’O.A.S. avait été décapitée. Ses dirigeants en avaient, de toute façon, déjà perdu le contrôle, mais la voie était désormais ouverte aux excès les plus aberrants des éléments fascistes et des « nazillons » de l’O.A.S.

 

Page 312 :

L’objectif premier de l’O.A.S. était de faire basculer l’armée française et les Algériens dans son camp pour créer une Algérie démocratique et « fraternelle ». L’O.A.S. était une résistance à l’abandon. Sans le drame algérien, ni les officiers français, ni les pieds-noirs accrochés à leur terre natale, n’auraient comploté contre la République. La majorité des militaires, et des pieds-noirs de cette organisation, n’étaient ni des fascistes ni des assassins.

 

Page 315 :

J’ai connu, en revanche, d’autres colons, ceux qui faisaient partie de plus d’un million d’Européens. Ils étaient médecins, enseignants, ingénieurs, ouvriers spécialisés, fonctionnaires, employés, chauffeurs de taxi, garagistes, chefs de gare, infirmières, standardistes, manœuvres, commerçants, agriculteurs… vivant de revenus inférieurs à ceux de la France métropolitaine.

Les colons agriculteurs n’étaient pas plus de 19.400 dans toute l’Algérie d’après le recensement de 1957, et 7.432 d’entre eux possédaient moins de 10 hectares. Avec leurs familles, ces colons formaient une population de 45.000 personnes à peine.

Bientôt, la France allait découvrir, sur le port de Marseille et ailleurs, lors de l’exode pied-noir, ces prétendus « grands colons » débarquant sans le sou, une valise à la main, de pauvres familles démunies, encore sous le choc de la violence des événements et de la brutalité du départ.

Les pieds-noirs ont autant souffert du système colonial – à l’origine de cette guerre inhumaine – que les Algériens, la plupart du temps sans le savoir.

 

Page 324 :

Ce serait une autre dérobade que d’attribuer la violence en Algérie au caractère national et à l’héritage culturel propres aux Algériens. Il est certain que les faits peuvent favoriser cette interprétation. La violence ne relève pas d’un déterminisme culturel et n’est le patrimoine d’aucune société. La violence est dans notre humanité. Ce sont des circonstances particulières qui la font exploser et s’imposer à une société, sous une forme ou une autre.